• - Des mots pour le dire -

    - Des mots pour le dire -

     

     

     

       Depuis des années que je suis de très près les revendications et plaintes      diverses de soignants (toutes catégories confondues, mais un peu plus les    infirmiers, et les libéraux, je l'avoue, corporatisme oblige) quelque chose me  chiffonne, me dérange, m'agace.... Voire me rebute.

     

     

    Mais difficile de dire quoi.

     

     

     

     

    Ai-je pris [trop ?] de recul par rapport à la pratique ? En suis-je si éloignée que je ne comprend plus les tourments de mes "ex" collègues ?  Oublie-t-on si rapidement (en quelques mois ?) les difficultés rencontrées durant 30 ans ? Si tout ceci est le cas, j'ai vraiment de quoi m'inquiéter. Car on pourrait ainsi effacer, d'un coup de gomme, des années de dur labeur et d'expertise ???

    Autre hypothèse: repartant toujours de ma prise de recul, j'aborde peut être mes réflexion de façon plus "globale" et moins centrées sur ma personne, en d'autres termes:  aurais-je une réflexion moins "égocentrique"?

    Mais toujours cette absence de "mots" pour expliquer d’où vient mon malaise face à toutes ces revendications, auxquelles pourtant j'adhère.

    Pour faire simple: je ressens que dans les associations ou regroupements des réseaux sociaux, tout tourne autour du "drame" que vivent les libéraux (médecins ou IDEL), et autour du harcèlement sans faille des caisses de sécu ou du gouvernement...

    Ce qui me gène, c'est qu'à lire tous les commentaires, il semblerait que chaque matin la ministre de la santé (Marisol ou autre, peu importe) se lève avec une seule idée: "que pourrais-je faire aujourd’hui pour faire chier les infirmiers libéraux ?". Et que donc, logique, le reste de sa journée sera consacré à cette obsession...

    Sauf que...NON.

    A mon humble avis: au mieux elle s'en fout des IDEL (à voir ses absences répétées de messages de soutien ou autre) et au pire elle trouve que le système actuel présente des failles, en matière de qualité et efficience, et que les IDEL seraient  partie prenante de ces "failles".

    Là je sens déjà des fulminations, des borborygmes rageurs, des "blacklistes" qui se préparent.  Fénelone que je suis... Oser marquer contre mon camp, c'est intolérable... Mais quand même, avant de me brûler sur le bûcher des vanités, suivez mon raisonnement...

    J'ai eu la chance d'assister à un colloque auquel participait un infirmier  philosophe et maître à penser en "éthique du soin", Walter HESBEEN*.  Et lui, de façon involontaire, m'a fourni une réponse, a mis en mots mes agacements....

    "La finalité de la pratique infirmière n'est pas l'infirmier mais le malade"

    Cette phrase résume à elle seule tout ce qui me dérange dans les revendications.

    Il me semble que l'on se trompe d'objectif, car au final l'unique raison d'exister d'un IDEL est bien d'aider les personnes singulières que sont les patients à vivre ce qu'ils ont à vivre ???

    "L'infirmier n'est qu'un moyen, que le chemin emprunté, pas la finalité".

    Ce qui ne veut pas dire qu'il ne faille se préoccuper des conditions d’exercice de ces soignants là, mais il ne faut pas les mettre au centre de la prise en soin, car au centre, c'est le patient qui doit s'y trouver, rien que le patient, juste le patient (et ses proches).

    Et d'une façon générale, lorsque l'on confond le véhicule avec la destination, forcément on se trompe de chemin.

    Alors, être choqué qu'il y ait des contrôles sur les cotations qui sont pratiquées, qu'il y ait une obligation de formation professionnelle, qu'il y ait des propositions de revalidation régulière du diplôme ou de certification des cabinets libéraux, des tarifs imposés et des "quotas" de volume de soins... être choqué de ceci prouve que l'on place le moyen au dessus de l'objectif.

    C'est que l'on considère qu’un IDEL est prioritaire dans le processus de prise en charge, prioritaire sur le récipiendaire qui est le patient et sur le payeur qui est l'assurance maladie.

    Il y a une grosse confusion qui est faite sur la signification du mode d'exercice libéral.

    L'IDEL exerce sous convention, donc il pratique un tarif d'actes qui est encadré et fixé, par les unions des assurances maladies. En contre partie, entre autre,  il paye très peu de cotisation assurance maladie (un peu comme à la SNCF ou EDF,  les agents payent un tarif minime). Ces honoraires perçus en échange des soins ne sont non pas "publics" (car la sécu est plutôt de droit privé) mais émanant d'une "mission de service public". C'est du Kif...

    En gros, l'argent perçu par les IDEL est de l'argent considéré comme public, et soumis à justification.

    Le mode libéral veut juste dire que l'infirmier est son propre employeur, et non qu'il peut exercer comme bon lui semble. Sinon il se déconventionne (comme les chirurgiens esthétiques) et devient libre de ses actes et encaissements.

    Le mode libéral (en opposition au mode salarié)  permet de moduler son revenu, on peut choisir de travailler plus ou moins selon ses envies ou contraintes, on peut prendre ses congés quand on le décide (et non en fonction du planning du service), on peut bosser 12h par jour si on veut s'offrir un voyage sous les tropiques, ou moins si on souhaite garder du temps pour sa famille (ou ses loisirs).

    Être libéral ne signifie pas que l'on soit affranchi de tous contrôles...

    Pour temporiser mes propos, il me semble que le VRAI problème réside dans la rémunération, les tarifs qui sont indécemment bas (IDEL et médecins) au regard des responsabilités engagées. Et si les soins étaient mieux rémunérés avec des paiements différemment agencés (exit la tarification à l'acte avec décote), les soignants retrouveraient qualité et vie et sourire.

    Car un soignant heureux = c'est un patient rassuré et sécurisé.

    Tout un système est à repenser, car bien sûr il y a eu des dérives. Bien sûr, certains s'en mettent plein les poches, jetant ainsi l'opprobre sur toute une profession. Mais bien sûr aussi : la plupart des IDEL sont au bord du désespoir, désespoir savamment entretenu par les communications syndicales qui sont souvent dans le "contre" et non dans la proposition constructive.

    Mais ne faut-il pas la peur du loup pour ramener les brebis égarées dans le troupeau???

    Sur ce, j'espère avoir allumé une petite loupiotte au fond de vous, ne confondez pas l'objectif du soin avec le soin, la finalité avec le moyen... Vous verrez les choses autrement.

    Libéralement vôtre

    Clématite

     

     *Colloque du sidoc à Paris le 11 mai 2016http://sidoc.fr/node/820

     

     

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